Pour notre grand plaisir EPHEM a encore frappé (2)


LES RADIOS LOCALES (suite)

par EPHEM

UN LOCAL POUR LA RADIO

Second semestre de 1981, nous sommes quelques amis désirant créer une radio FM et nous sommes à la recherche d’un local. Vu l’état des finances dont nous disposons, louer un bureau, une boutique, un petit studio est tout simplement exclu. De plus nous avons conscience qu’il faut aller vite. A la réflexion, il apparaît que ce local doit répondre à plusieurs critères :

  • être accessible aux différentes personnes qui devront se relayer aux manettes

  • être cependant sécurisé par crainte des indésirables, des voleurs ou du vandalisme

  • être situé dans un milieu non bruyant ou assez bien insonorisé

  • avoir un endroit à proximité pour disposer le mât qui supportera l’antenne

  • être d’une surface suffisante pour pouvoir accueillir quelques invités à une émission.

Avec des bonheurs divers et variés, les radios vont trouver un local, quelquefois provisoire, rarement luxueux et parfois cocasse : légende ou réalité, il a été écrit que les 2 comparses ayant créé NRJ se sont lancés en installant leur matériel sur 2 planches posées sur la baignoire d’une salle de bain !…

En zone rurale, on trouve parfois un coin de grange facilement aménageable, par contre en ville, les locaux disponibles et bon marché sont plus rares. Concernant la radio à laquelle j’ai participé, le problème du local a été résolu assez simplement. L’un des « membres fondateurs » étant propriétaire d’un pavillon en ville haute, il est apparu qu’on pouvait utiliser un espace contigu à sa maison pour y implanter un local en construction légère. Pas de fondations mais un plancher constitué de palettes et de panneaux de particules, cloisons en placo, bref, bien avant d’envoyer la musique, chacun dans l’équipe s’est investi en fonction de ses capacités.

Résultat obtenu, ce local d’environ 30/35 m² de plain-pied facilement accessible mais discret avec, desservis par un couloir, la régie (matériel BF relié à une table de mixage) et de l’autre côté d’une vitre, le studio avec une table et plusieurs micros. Ce n’est pas le grand luxe mais avec un peu de « système D »…

Et l’antenne alors ? Cela peut être utile ! Un mât d’environ 12 mètres est bricolé en mettant bout à bout plusieurs sections de tubes de 35 m/m de diamètre, mât qui sera haubané et sur lequel on fixe une sorte de « trombone ». Oh pardon ! Le trombone en question s’appelle un dipôle, bande d’ignares ! Le matériel HF (un pilote et un ampli HF) quant à lui, sera placé dans les combles du pavillon, le plus près possible de l’antenne. On va bientôt pouvoir émettre, mais au fait, sur quelle fréquence ?

LA FRÉQUENCE

En parcourant la bande FM, on constate qu’à côté des France inter, France musique et France culture, on entend des bruits bizarres, les essais des radios concurrentes et parfois « des blancs ». Les néophytes que nous sommes apprendront à quoi correspond ce blanc : une porteuse. Si on scanne lentement la bande FM d’un bout à l’autre, et que le bruit de fond disparaît pour faire place au silence, on est en présence d’une porteuse. Si on continue à scanner on retrouvera le bruit de fond. La porteuse est le résultat d’un signal engendré en FM, signal qui ne reçoit pas de modulation (pas encore pour l’instant).

En l’absence de directives précises des pouvoirs publics, chaque radio naissante va s’octroyer une fréquence située dans une zone de la bande FM encore disponible et, même si elle n’est pas encore en mesure d’émettre un programme musical, va entretenir au minimum une porteuse sur cette fréquence 24h sur 24 pour signifier aux autres son intention de l’occuper plus tard.

Assez vite, la bande FM va connaître une nouvelle vie. En province, on assistera parfois à des querelles, non pas de clochers mais de fréquences, querelles qui se régleront plus facilement quand on pourra savoir qui émet et pouvoir prendre contact avec lui. Bien souvent, il suffira de décaler sa fréquence de quelques dixièmes de Mhz pour ne plus gêner l’autre.

Sur Paris, il n’en va pas de même. C’est la cacophonie ! Le nombre de radios FM explose : il faut admettre que la bande FM n’est pas plus large ici qu’en province, 88 à 108 Mhz ! Certaines disposent de budget conséquent leur permettant d’atteindre des puissances élevées et jouer les trouble-fête ! On retrouve l’anarchie et les incivilités connues des utilisateurs de CB à une époque. A Paris les radios sont si nombreuses qu’en circulant avec un autoradio allumé, il suffit de passer d’une rue à un carrefour pour passer d’un émetteur à un autre !

Le tuner qui n’avait que les 3 radios FM étatiques à capter n’est plus suffisamment précis et a toutes les peines à se caler sur une radio et une seule ! Cette évolution de la FM va amener les industriels à produire des récepteurs grand-public plus performants.

UN NOM POUR LA RADIO

Et un nom qui sonne bien, si possible ! Toute l’équipe est mise à contribution pour trouver le nom à donner à la radio. Le R de radio sera conjugué à toutes les sauces. La première idée va déboucher sur des « Radio-quelque-chose ». Oui, mais quoi ? De plus, il faut s’assurer que les initiales puissent constituer un sigle facile à décliner, et imaginer l’annonce « Vous écoutez RYZ sur 95 point 2… ». qui sera très souvent diffusée à l’antenne pour s’identifier et se faire connaître.

Au passage, on peut noter qu’on annonce la fréquence « 95 point 2 » et non « 95 virgule 2 » une syllabe au lieu de deux pour aller plus vite !

Certains ont des idées géniales tenant du slogan, Nouvelle Radio des Jeunes ou NRJ, radio qui ne manquera pas d’énergie ! Pour ne parler que des radios proches du Havre, on trouvera également

des termes génériques (sans signification particulière) comme SKYROCK, RESONANCE ou SOLARIS (Yvetot)

des noms liés à une situation géographique RADIO PORTE OCEANE ou RADIO CAP DE LA HEVE, liés à la présence de la mer avec RADIO ALBATROS ou RADIO FORCE 7 (la tempête).

des noms définissant un style comme NOSTALGIE ou RIRE ET CHANSONS

Etc, etc

UNE BONNE DOSE DE BRICOLAGE

Construire une installation électrique en 220v chez soi ou assembler les éléments d’une chaîne HI-FI ne pose pas de problème particulier à un bon bricoleur mais une radio va vite demander des connaissances techniques qu’il va falloir acquérir sur le tas. Outre les éléments « basse fréquence » reliés à la table de mixage, nous devons maîtriser des matériels totalement nouveaux : le pilote HF, son amplificateur et l’antenne. Les fournisseurs sont peu nombreux, parfois peu compétents et nous-mêmes, sommes incapables de choisir à bon escient un montage plutôt qu’un autre !

Mais il faut se lancer : nous sommes conscients qu’il nous faut occuper une fréquence et bien que l’installation ne soit pas complète, nous allons émettre à titre d’essai. Quelques membres de l’équipe sont prévenus et vont guetter en différents points de la ville l’apparition de la porteuse puis du premier signal suivi d’une musique entrecoupée de temps en temps par le message « Vous écoutez R…. ». A l’époque, je réside au 17ème étage d’une tour de Caucriauville. Vu ma situation particulièrement dégagée, je capte sans problème l’émission venant de Sanvic et en informe par téléphone. En ville basse, les résultats sont inégaux, le signal ne passe pas partout avec un niveau satisfaisant. Par contre, coup de théâtre : un habitant de Manéglise appelle pour signaler qu’il nous reçoit tout à fait correctement ! A vol d’oiseau, il se situe à un peu plus de 13 kilomètres !

Nous allons, bien sûr, multiplier les essais, orienter l’antenne dans différents axes, apprendre qu’un dipôle est plus efficace lorsqu’il est « taillé » en fonction de la fréquence et prendre en compte la topographie du Havre. La ville est grosso-modo inscrite dans un triangle de 60° avec la Manche à l’Ouest et le port avec l’estuaire au Sud : n’en déplaise aux cormorans mélomanes, il faut diffuser en priorité vers l’intérieur des terres, donc cap vers le Pays de Caux. Par ailleurs, la ville est disposée sur 2 niveaux, ville basse et ville haute. Pour rayonner au maximum, l’endroit le mieux adapté se situe en ville haute et près de la ligne de rupture entre ville basse et ville haute.

Pour s’en convaincre, voyez de nos jours ce pylône situé à l’angle des rues de Cronstadt et Félix Faure, cette antenne sur l’un des 3 réservoirs au 45 rue Salvador Allende et bien sûr, le relais de télévision rue Andréi Sakharov…

Les bricoleurs de l’équipe ont du pain sur la planche pour compléter l’installation de la radio……

A suivre …

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